Espace ContreContre

Imaginé et fabriqué par Edouard Faro et Julien Marolf (sculpteurs), l’Espace ContreContre a été inauguré en 2016. 

Créée par un collectif d’artistes réunissant maints savoir-faire et expériences, l’association ContreContre s’engage à promouvoir la création sous ses différentes formes. L’envie est d’explorer les diverses disciplines artistiques anciennes et contemporaines en proposant à un large public les travaux d’artistes valaisans et d’ailleurs.

L’espace est constitué d’un assemblage de matériaux brut tel que le bois, le métal et le béton. Il comprend un espace d’exposition ouvert sur l’extérieur. Les jardins l’entourant accueillent une exposition permanente de sculptures.

Le lieu d’exposition d’une surface de 150 m2 bénéficie de grandes cimaises en béton d’une hauteur supérieure à 3 mètres. Il permet l’installation d’œuvres de grand format voire monumentales. L’emplacement des lumières a été étudié de façon à ce que le travail des artistes bénéficie d’une mise en valeur optimale.

D’avril à novembre, ContreContre organise plusieurs expositions avec une programmation simultanée d’événements scéniques.

Le Groupe On KAWARA rencontrera Faro au cours de sa visite du lieu. Un artiste dont les créations disent l’affrontement sévère de l’homme et de la matière et les forces qu’épuise ce dialogue ardent.

Ses oeuvres qui appellent la caresse couvent en elles la mémoire d’amoureux, mais vifs duels. En effet, Faro engage tout son être dans cette lutte avec des bois imputrescibles tels le cèdre ou le chêne, se mettant tantôt à leur écoute, respectant les formes que spontanément ceux-ci proposent, tantôt inventant des outils pour que ces matériaux découvrent l’or ignoré de leurs entrailles. Il compose avec la disposition de leurs veines, leur dureté, la finesse de leur grain et, bien sûr, leur couleur.

Dans ce combat, la matière connaît une saisissante mue, perdant sa nature ligneuse pour se confondre avec la suavité du velours. Parfois, au contraire, le bois semble aspirer à une éternité minérale.

Qui dit « combat » entend souvent débauche d’énergie. Il ne faut toutefois pas s’arrêter à cette trompeuse évidence ; car la sculpture par taille, surtout avec ce matériau quelque fois retors qu’est le bois, exige non seulement un lourd investissement physique, mais plus encore une contention de pensée, une énergie pour ainsi dire spirituelle.

Le bois se présente ici dans tous ses états : de la pièce immense et majestueuse au modeste et vif éclat. Cependant, Faro associe beauté et sobriété : même ses compressions méticuleuses de bois flotté voient ces minuscules éléments quitter leur singularité « asociale » pour se fondre dans une forme complexe et cohérente. Sans aucun doute, cette épuration formelle ne se réduit pas à une quête strictement esthétisante. Non, elle est d’essence symbolique et recherche un absolu dont nous interrogerons – plus bas – le sens.

Certaines pièces – dont celles suspendues – se jouent de la pesanteur, causant chez le contemplateur une satisfaction d’équilibre. Immobiles, elles intègrent toutefois la dimension du temps. Bien sûr, la pièce justement nommée Temps nous conforte dans cette interprétation ; mais remarquons aussi ces morceaux de bois, ouvragés ou non, qui font penser à des langues, des coulées inspirant à nos rétines l’illusion du mouvement, celle de la vie. Cette fluidité, cette motilité ont souvent comme envers le hiératisme de certains socles, créant une opposition de rythmes qui confère un troublant magnétisme aux œuvres de Faro.

Les pièces suspendues nous amènent à ajouter un mot relatif aux socles, supports d’une transcendance ou d’une offrande (comme dans l’œuvre du même nom, mais également dans d’autres cas, comme ceux des différentes Tours dendrolithes, bleue ou oasis). De ces sculptures sourd une générosité, la volonté d’effectuer un don. La dernière tour citée ravit, en outre, par le contraste entre la dignité de son élévation et l’humilité des épaves de bois flotté, épaves se remémorant le bercement paisible de l’écume.

Arrivé à ce point, il convient peut-être de noter la tonalité féminine de l’univers de notre artiste. On pense notamment aux sèmes des Ecales, du Méridien d’origine et de La Graine. Faut-il avoir l’esprit fâcheusement tordu pour lire dans ces enveloppes protectrices en apesanteur, ce grain fendu et ces sillons méridiens en forme de vulve la nostalgie d’une harmonie fœtale où principe de plaisir et principe de réalité communiaient dans un sourire tranquille ?

Sans contredire notre dernier constat d’un hommage à la maternité, il nous faut à présent rendre compte du choix fréquent de la verticalité et de la forme pure. Il évoque, à notre sens, une nostalgie du sacré, d’un sacré sans rapport avec les rites compassés de nos religions occidentales. Il y a chez Faro comme un art archaïque, totémique cherchant la voie d’une relation tellurique avec les Forces premières du Monde, avec la Mère nourricière. Comment comprendre L’Offrande, cette vasque de grande dimension visiblement dressée sur l’autel d’une puissance qui nous dépasse ? De ce matériau a priori rustique, Faro fait ainsi le marbre de la plus noble inspiration. Dans ses ouvrages, le bois semble se souvenir de son origine, de l’arbre qui le porta en son sein, de la vie qui coula en sa sève. Cet art, renouant avec la Nature, constitue peut-être la particularité du message de ce sculpteur vrai qu’est Faro.

D’après un texte de Mathieu Menghini

Espace ContreContre
14, rue des Glariers à Saint-Maurice