Retour d’Ana sur La Boucherie de Job

« J’ai été voir la pièce par moi-même avec 2 amies, cela faisait longtemps que je n’étais pas allée au théâtre »
« J’ai trouvé cette pièce très dense, il y avait trop de changements, avec le même sujet on aurait pu faire 2 ou 3 pièces différentes. Mon amie aussi a trouvé trop dense. Mais comme ça faisait longtemps que je n’étais pas allée au théâtre je pense que c’est à cause de cela que ça me semblait dense »
« C’était bien joué, bien écrit »
« J’avais bien saisi le déroulement de plusieurs parties. Tout allait très vite. Plusieurs vies dans une seule vie et en effet c’était ça »
« Les 2 légionnaires du début : c’était la problématique de l’argent. Le jeu de vouloir tromper l’autre, de vouloir gagner. Dans un jeu il y a souvent une tendance à rouler l’autre »
« Ce boucher qui ne pouvait pas payer ses dettes, ne pouvait pas payer le garçon boucher et son fils avec son expérience qui pouvait sauver son père »
« L’écrasement : ils ont dû disparaître dans un trou. La scène avec la pierre j’ai vu cela comme un désir d’écraser l’autre à ce moment là, symbole de certains qui veulent écraser les autres, force de pouvoir »

Ce qui m’a touchée :
– « Le père fidèle à ses valeurs, il est prêt a mourir, prêt a perdre son commerce mais le plus douloureux pour lui c’est de ne pas pouvoir subvenir aux besoins de sa famille et de ne pas pouvoir payer le garçon boucher »
– « Le conflit avec son fils, les solutions du fils dépassent le père car elles ne sont pas en adéquation avec ses valeurs et principes »

L’homme tout nu :
« J’étais étonnée de le voir tout nu mais ça ne m’a pas choquée. J’ai compris par rapport à la scène. Cet homme à un moment donné a tout perdu. Tout perdre c’est se sentir nu face à soi-même.
Cet homme est passé par différentes étapes : femme (parce qu’il avait un déguisement de femme à un moment) et homme nu symboliquement libéré quelque part de tout ce qui peut nous empêcher d’être nous-même »

L’injustice :
– « Conflit du fils par rapport au père. Le fils ne respecte pas le désir du père, il fait valoir ses connaissances, ses acquis sans tenir compte des valeurs de son père ». Il veut « sauver » la situation avec l’argent et ses méthodes, ses valeurs à lui.
« Le fils séduit la femme, il utilise tous les moyens possibles pour arriver à ses fins. Il a des valeurs sous condition »
« Le père est dans le refus des nouvelles valeurs de son fils. Il y a de la non reconnaissance de la « générosité » de son fils. J’ai été touchée par les phrases du père à son fils et la façon de les poser : « ah c’est toi ? .. De l’argent.. ; ta mère t’a écrit… la maladie de ta sœur ? »
Il prenait le temps de les poser comme s’il attendait la réponse. Mais dans toutes ces questions, il y en a à mon avis une seule ; « où étais-tu pendant si longtemps ? Le désir caché du père, c’était d’avoir son fils, sa présence, c’est cela qu’il aurait voulu. N’oublions pas que le père appelait le jeune commis « mon fils ».
Il remet en cause les valeurs du fils, la transmission des valeurs qui étaient les siennes. »
– « La mère a été la première à mourir. Elle a fait ce lien, elle a renoué avec le fils, pour qu’il les aide. Elle a ce rôle caché de la femme de faire des liens, sa souffrance n’est pas reconnue. Cela a du sens qu’elle soit morte en premier. Pourtant, c’est le père qui aurait dû mourir en premier, il portait toute la charge, le poids des dettes, il était fatigué, il luttait… mais c’est bien elle qui est morte avant. Cette femme qui voulait bien faire, son geste n’a pas été valorisé, elle a fini par mourir, n’a pas vu les résultats de son acte. Elle avait ce savoir-faire des femmes. »
– « La vitesse : Je trouvais que la pièce était trop dense mais c’est peut être pour montrer la société d’aujourd’hui. La vitesse c’est ce qu’on vit aujourd’hui dans la société. Le désir de vivre à 200 à l’heure, tout vouloir faire, tout vouloir dire, tout va trop vite.
Dans la pièce ils ne se donnent pas le temps de comprendre. Le rôle de la mère qui veut trouver la bonne solution entre le père et le fils, qui se fait un peu médiatrice aussi. Elle voulait bien faire mais c’était trop tard car la vitesse du fils dépassait le père, lui qui a vécu toute sa vie dans sa boucherie avec sa petite famille »
« Dans cette société on ne respecte pas le rythme de chacun. Certains sont mis de côté car les choses vont trop vite »
(Anna a donné l’exemple des transports en avion, aujourd’hui c’est difficile d’acheter un billet d’avion, il faut Internet, une imprimante, les flash codes, l’enregistrement… si tu ne comprends pas les nouvelles technologies tu es perdu, le monde va à une certaine vitesse et soit tu suis soit « tu te mets et on te met à l’écart »)

Aurore Sanchez, volontaire ATD Quart Monde (pour la restitution)