14 janvier 2019 – Projection du film Je ne suis pas une sorcière de Rungano Nyoni

Voici ma modeste contribution au journal de bord avec la relation de la dernière sortie du Choeur Pylade
je cherche une manière oblique – voire originale – de retranscrire cette soirée, mais ne trouve point !

En ce cas, une manière originale voudrait seulement dire « autrement », alors que le succès (à mon sens) de ces sorties est toujours le même – l’objectif étant le même – qu’il me semble déjà avoir été analysé et répété.
Oui nous avons été intelligent.e.s collectivement, attentif.ve.s les un.e.s aux autres, généreux.ses de parole face aux autres, critiques, sensibles.
Nous avons expérimenté encore une fois une petite démocratie (partage de l’espace, de la parole, de l’écoute, de nos expériences)
Avons été citoyen.ne.s (penser le monde) et éprouvé le médium artistique.
Et encore : l’impression nette que chaque sortie n’est pas la répétition de ces enjeux, mais qu’elle provoque bien un renforcement – de solidité, d’émancipation, d’affirmation, de sens critique.
Je m’en contente et m’en satisfais grandement, mais comment le dire sans avoir l’impression de le redire ?

Pour cette première sortie de l’hiver, une projection filmique à Fonction : Cinéma, Je ne suis pas une sorcière.
Un conte d’une jeune réalisatrice zambienne, Rungano Nyoni.

Des femmes, et parmi elles une enfant, sont attachées à de grandes bobines de fil par de longs rubans blancs. Ce sont des sorcières, supposées telles par d’ancestrales croyances. On dit que celles qui s’échapperont peuvent aller tuer des gens et les transformeront en chèvres. Bien utiles aux hommes et aux puissants (même si chaque puissant se retrouve à son tour dominé par plus puissant encore), ces croyances sont un instrument de domination qui se découvre au long du film à travers des scènes tantôt drôles, tantôt violentes.

Débriefing et impressions
Pour illustrer la fable, Laurence nous raconte une histoire : en Inde, les jeunes éléphants captifs sont attachés à des liens semblables aux rubans blancs. Des liens relativement fragiles. Une fois adultes ils gardent ces mêmes liens. Ils pourraient facilement les briser mais ils ne le font pas et restent soumis.
Chantal remarque que les sorcières sont attachées, alors que les sorciers ont des pouvoirs craints et respectés.
Florence et Mireille, pour la première fois parmi nous, se demandent si cette dénonciation vise des croyances universelles ou des situations spécifiques à la Zambie.
A la fin, lorsque les sorcières se sont échappées, évoquant le parallèle avec la chèvre de M. Séguin, Laurence remarque qu’on ne les voit plus et qu’elles sont peut-être mortes.
Jean-Marie se demande si la jeune fille ne s’est pas finalement sacrifiée. Cela ferait écho à une scène du film ou l’on voit un sacrifice de poulet.
Je note pour ma part le regard aiguisé du groupe et notre plaisir à aller chercher et débusquer les figures universelles et les enjeux soulevés dans les scènes et les interlignes du récit.
Nos compétences de « lectures » – acquises au fil des sorties – et notre expertise de spectateur.rice.s averti.e.s ne nous empêchant pas d’être sensibles et touché.e.s, voire indigné.e.s devant toutes les violences du pouvoir que dénonce le film.

Petit bémol : le lieu de notre échange.
La maison du Grütli est pleine d’événements divers et ne reste que le café du Grütli, chaleureux mais bien trop bruyant et cela nous empêche de vraiment nous retrouver, bien que nous soyons ce soir un petit groupe de 7 personnes.

Jean-Luc Riesen